Bonjour à toi !
Juste avant de passer à l’écriture de cette Love Note, j’écoutais un podcast où l’animatrice proposait des places dans son incubateur créatif.
J’adore l’idée. Ça me donne envie d’imaginer un incubateur créatif pour cette communauté, aussi. Faire grandir nos créations ensemble, les fertiliser, croiser les regards, les influences, écouter, admirer et s’inspirer.
Comme d’habitude, je vais laisser germer l’idée et voir ce qu’elle a envie de devenir, mais si ça vous parle, si c’est un espace qui pourrait vous faire envie, dites-le moi comme ça je vois si on est plusieurs à rêver de ça.
Passion fanzine
Cette semaine je n’ai pas écrit de poèmes, j’ai dessiné, et plongé dans le monde des magazines et des fanzines. C’est une passion de longue date, qui repointe sa tête régulièrement : j’adore les fanzines pour la grande liberté qu’ils offrent : il y en a sur tous les sujets, de toutes tailles, de toutes ambitions, dessinés, écrits, collés, peints… Ils peuvent être professionnellement réalisés ou bricolés sur un coin de table à n’importe quel moment. Numériques ou photocopiés à la Corep du coin.
Si tu n’as jamais entendu ce mot, fanzine vient de la contraction entre “fan” et “magazine”. Ce sont des tout petits magazines, souvent quelques pages, très souvent 8 pages parce qu’on peut les fabriquer en pliant et découpant une simple feuille A4, et ils sont le plus souvent faits-main, imprimés et distribués de façon artisanale, en peu d’exemplaires.
Je les adore pour leur inutilité et leur versatilité. Ils sont parfaits pour expérimenter dans un cadre donné, et pour apprendre à raconter une histoire, à explorer un sujet, à créer du rythme, du suspense, à voir comment la mise en page peut servir ou desservir ce qu’on raconte.
Et puis comme les petits livres, ce sont des objets de création accessibles, qui nous permettent d’explorer notre voix et de se découvrir en tant qu’artiste / créateurice.
Donc aujourd’hui, je me suis pris une journée pour faire des fanzines, sortir mes ciseaux, découper, dessiner, expérimenter. C’était bizarre. J’ai tellement l’habitude de travailler dans une direction, vers un objectif, que cet espace de pure expérimentation était déroutant. Mais agréable aussi. Ne faire que des choses utiles, je crois de plus en plus, vide la vie de son jus.
Alors pour continuer, j’ai envie (avant de te montrer mes premiers essais moches), de savoir ce que sont tes passions, quelles qu’elles soient, même si elles semblent fugaces. Qu’est-ce qui t’obsèdes en ce moment. Comme disait ma pote Rozina : “sur quoi tu truques ?”
Parce que ce qui retient notre attention est précieux.
Je suis aussi tiraillée parce qu’il y a des conseils qui semblent du bon sens et qui disent “faites attention à vos centres d’intérêt moyens, ils vous empêchent d’être obsédé par ce sur quoi vous avez le plus de valeur à apporter”. Mais j’ai aussi l’impression qu’au final, on est plutôt bons pour reconnaître ce qui nous passionne bof et ce qui nous hante et ne nous lâche pas. Même si on met longtemps à entendre l’appel.
Et on met parfois du temps à trouver comment tout ça s’agence, et c’est ok. J’ai pas envie de Marie Kondoïfier la créativité. Je veux lui ouvrir grand les bras et voir où ça m’emmène. J’en ai marre de tout ce capitalisme intériorisé qui me vole la fraîcheur de mes élans si je le laisse trop faire.
Je me suis méfiée de mes passions parce que je les trouvais dangereuses ou douteuses : elles pouvaient m’éloigner de la vie normale, la vie attendue si je leur donnais trop d’attention. On ne devient pas poétesse à 40 ans, encore moins illustratrice / poétesse / expérimenteuse de création. En plus je me racontais que je changeais de passion tout le temps que je survolais tout, comme un papillon qui n’arrive pas à rester assez sur une fleur pour la butiner. Pourtant mes passions sont les mêmes, en boucle depuis des dizaines d’années maintenant. Et de nouvelles sont aussi apparues, et c’est ok.
Avec du recul, je vois par contre quelque chose très clairement : une passion créative sans mise en pratique, c’est frustrant, voire décourageant. C’est ça qui fait le lit des regrets et des sensations de gâchis. Si tu aimes quelque chose, quoi que ce soit : accorde toi du temps pour le faire, pas juste pour en consommer.
Le temps fera le tri entre les trucs que tu pensais aimer mais qu’en fait t’as juste envie de regarder de l’extérieur, et les trucs dans lesquels t’as une grande joie à mettre les mains et triturer. Il vaut mieux avoir des mains d’artisans qu’une histoire d’artiste raté·e qu’on se ressort à toutes les crises existentielles.
N’attends pas : mets les mains dedans, peut-être que ça durera trois jours, trois mois ou le reste de la vie, mais tant que tu regardes des comptes instagram et que tu lis des livres sans te mouiller, tu ne le sauras jamais.
Et sans plus attendre, une démonstration de “mettre les mains dedans” : mon après-midi fanzine. Attention, prépare-toi à ne pas être ébahi·e, voici mes premiers essais sans texte, pour un exercice sur le rythme (du très bon cours d’Alfonso de Anda justement).
Cette semaine
❤️❤️❤️❤️ Retourner à la salle de sport. C’est drôle comme j’étais restée bloquée sur ma façon de faire du sport il y a 10 ans (intensément, tous les matins avant le taf), et j’ai tourné en rond des années à ne pas “réussir à m’y remettre”, et là je découvre une toute autre pratique et j’adore. ON A LE DROIT DE CHANGER D’AVIS (je l’écris pour moi au cas où j’oublie à nouveau)
❤️❤️❤️❤️ Continuer ma pratique de journaling mais en images, avec une exploration libre et en écoutant mon goût pour ces mélanges d’images et de mots
❤️❤️❤️ Participer en tant que jury à un prix de femmes entrepreneures et entendre parler des projets par des meufs si passionnées.
❤️❤️❤️ et 💔 Ce week-end c’était la fête des pères et ma nièce faisait son spectacle de théâtre, et j’étais techniquement libre mais… j’avais tellement envie et besoin d’une journée seule à écouter mon rythme et créer. J’ai réussi à ne pas y aller mais c’était pas facile !
5 choses que j’ai envie de partager
Cette semaine ce sera 5 citations issues de LA lecture qui m’a emportée comme un thriller mais a surtout mis des mots sur des suspicions et des questions de santé mentale que portent les femmes, dans de nombreuses familles dont la mienne.
Ce livre est très beau, j’ai déjà envie de le relire pour comprendre comment l’autrice accomplit ce tour de force de nous emmener dans toutes ses recherches sans nous perdre, sans nous donner de solutions faciles ni détourner les yeux quand ça devient trop dur. Sans laisser son arrière-grand-mère devenir une exception, une martyre de faits divers, mais une victime d’un système, d’un établissement justement, qui ne commence pas à la porte de l’Asile mais bien avant, dans les replis intimes puis secrets de la famille.
Donc voici de façon arbitraire et non-spoilante, 5 citations de Mon vrai nom est Elisabeth, d’Adèle Yon, aux éditions du sous-sol
“Il est des établissements qui sont comme des familles et des familles qui sont des établissements. Des établissements qui sont des familles, je n’y crois pas trop, par contre des familles qui sont des établissements, ça j’y crois beaucoup. Des familles où une organisation est faite en dehors de l’affect. Des mécanismes d’autorité, des valeurs bourgeoises où l’émotion, la parole, n’ont aucune place...”
Je n’en veux à personne (…) mais ces choses-là, ça se partage en famille. Je ne veux pas porter toute seule le poids du secret que personne ne veut savoir.
J'ai découvert l'époque par ses folles. Leurs voix, hybrides, mi-rapportées mi-brutes, me tournent autour et s'agrippent à la sienne, manquante.
Est-ce cela, le sentiment d'une dette de mémoire?
Suis-je la seule à l'entendre, ce cri qui me déchire les tympans alors que je remonte les allées encombrées, pressée entre les rangées d'étagères ?
Est-ce qu'on meurt de ne plus croire aux histoires avec lesquelles on s'est construit ?
Boum. Mic drop.
Bonne semaine et bonnes passions !
Laure
Toute ta newsletter m'a plu mais mon passage préféré c'était les bruits de mastication pendant que tu filmes ton fanzine (et essayer de deviner ce que tu mangeais. Une pomme ?).